Une femme qui a des opinions et qui les assume, est une femme qui parle trop au goût de certains. En Guinée, le milieu politique a encore du mal à s’accommoder à la présence des femmes dans l’espace public et les instances dirigeantes des partis politiques. Des femmes qui refusent la figuration et qui prennent position.

Au lendemain de l’élection de l’élection controversée à la mairie de Matoto, il semble que le monde politique par essence masculine reproche à une femme politique ses choix et opinions. Ce n’est pas « la politique » qui est ciblée mais la femme

Domani Doré, candidate indépendante qui briguait la mairie de Matoto lors des élections communales du 04 février dernier, fait l’objet d’attaques par voie de presse, d’homme politique et pas des moindres.

Un élu du peuple et de surcroît chargé de communication d’un parti politique utilise des propos très peu respectueux à l’endroit de Domani Doré en raison de son choix politique. Son entreprise est appuyée par de vaillants internautes, qui ont aussi leurs mots à eux pour démonter la femme politique qui ose porter haut ses choix. Alors que le débat repose sur la fiabilité et la crédibilité des élections tenues le 15 décembre dernier, la riposte a porté sur la vie privée.

Cette actualité montre qu’en Guinée, la politique reste encore l’affaire des hommes. Les femmes sont invitées à orner l’arène politique Les leaders et les politiques au féminin ont été victimes de cabale du seul fait qu’elles sont femmes comme en témoignent certains faits en 2009, 2010. Le code électoral invite les partis politiques  à inscrire sur les listes électorales au moins 30% de femmes. Un texte qui n’était ni contraignant ni  explicite sur le positionnement des femmes sur les listes électorales. Tuer la misogynie politique reste alors un leurre.

L’aventure sur le terrain politiques pour les guinéennes s’avère rude. Pour celles qui entreprennent le voyage, il faut se battre deux fois plus que les hommes : il faut également s’attendre à des attaques sexistes des plus stupides comme ‘’prostituées’’ ou ‘’concubines’’ d’un X ou Y. Le harcèlement sexuel et le chantage sont aussi des recettes qui s’invitent au menu.

Pour décrire la domination masculine du champ politique, la sociologue Françoise Gaspard propose le concept de « fratriarcat ». Comme dans un vestiaire de rugby, tout se fait entre homme.  Les règles du jeu politique, ses pratiques, sa culture, sa langue, ont été fondées et institutionnalisées par et pour des hommes.

La Guinée, au-delà du discours politique ne répond pas au profil d’un pays qui s’inscrit dans la diversité de la parole publique. En tout cas la contradiction portée par une femme politique ou publique n’est pas encore la pilule à avaler.

En 2009 par exemple, le capitaine Dadis traitait une de ses ministre femme wrangler, comparée à un tissu que tout le monde porte. Pourtant au moment de sa prise de pouvoir, le même avait démarché les services de cette femme politique atypique, première candidate indépendante de la Guinée à accéder à une mairie.

En 2010, lors des élections présidentielles, le candidat Alpha Condé avait réussi à débaucher Dr Makalé Traoré de l’Union des Forces Démocratiques de Guinée pour en faire sa directrice de campagne. Un challenger à ce poste qui était frustré s’était attelé à faire circuler une rumeur d’infidélité autour d’elle.

Les hommes politiques doivent être des modèles dans nos sociétés en incarnant dans leurs pratiques le respect des valeurs et principes qui fondent les droits humains. Leurs actes doivent contribuer à construire la crédibilité de la République et son caractère inclusif qui fait des femmes, des électrices et des éligibles juste come « UN CITOYEN »?

Les grands partis politiques choisissent rarement des femmes à l’issue des primaires car ils estiment que celles-ci ont moins de chances de gagner. Femme porte-parole de partis politiques, est une fiche de poste introuvable sur l’échiquier politique guinéen.

Il arrive qu’un parti politique cherche à se faire bien voire en choisissant une femme mais ne la soutienne pas suffisamment pour qu’elle remporte l’élection.

En Afrique, Ellen Johnson Sirleaf, présidente du Libéria, Joyce Banda, l’ancienne présidente du Malawi, Ameenah Gurib-Fakim, la présidente de Maurice, et Catherine Samba-Panza, l’ancienne présidente de transition de la République centrafricaine font partie de ces femmes qui ont brisé « le plafond de verre ».

La place de la femme dans la société guinéenne tient à la persistance de sa représentation sociale : gardienne de valeur morale, pivot de l’espace domestique et soumise à l’homme. Leur avenir politique reste un marathon indéfini.

Dans le monde entier, l’image de la politique comme une activité virile est bien entretenue. La Guinée n’est pas une exception mais un minimum de respect dans la parole publique pour une meilleure éducation de l’opinion. C’est l’effort à fournir pour ennoblir la politique afin qu’elle nous parle de la gouvernance de la cité des femmes et des hommes.

En lieu et place des injures, remettez la loi sur la parité à l’ordre du jour de notre auguste assemblée nationale.

Monique Curtis