Huit chroniqueurs du Nation Media Group (NMG) ont annoncé leur démission du plus grand groupe de presse kenyan pour dénoncer les ingérences croissantes du gouvernement. Reporters sans frontières (RSF) appelle les autorités kenyanes à ne pas entraver l’indépendance des médias.

“Nous refusons d’être réduits au silence.” C’est avec ce titre laconique que, mardi 24 mars, huit chroniqueurs ont annoncé, dans un communiqué, leur démission du Nation Media Group (NMG), le plus grand groupe de presse au Kenya. “Ecrire pour le NMG fut un honneur mais ce n’était plus tenable. Je démissionne pour protester contre les atteintes croissantes à la liberté de la presse”, a expliqué sur Twitter l’un d’entre eux, le professeur Nic Cheeseman. Des accusations démenties par le groupe qui assure “avoir toujours mis un point d’honneur à ne pas modifier les chroniques sauf pour corriger des erreurs élémentaires.”

Ces démissions font suite à une série d’incidents dont le dernier date du mois de janvier avec le non renouvellement du contrat de Linus Kaikai, le directeur de la télévision NTV appartenant au groupe NMG. Le journaliste avait dénoncé la collusion entre gouvernement et propriétaires de médias qui n’avaient pas couvert la prestation de serment symbolique du chef de l’opposition Raila Odinga, qui revendique avoir remporté l’élection présidentielle de 2017. Quatre chaînes, dont NTV, avait été fermées pour leur couverture de cet événement.

“Cette vague de démissions devrait interpeller les autorités kenyanes et la direction du groupe NMG, estime Arnaud Froger, responsable du bureau Afrique de RSF. Tous ces chroniqueurs ont fait le choix de partir librement pour protester contre la multiplication des pressions politiques. C’est l’indépendance de 17 médias membres du groupe NMG qui est en jeu.”

Il y a deux ans, plusieurs chroniqueurs avaient déjà sonné l’alerte dans une lettre adressée à la direction de NMG, lui reprochant sa soumission aux pressions politiques après l’éviction d’un célèbre éditorialiste du Daily Nation, Denis Galava, qui avait dénoncé la mauvaise gestion de la crise économique par le président Kenyatta. Quelques semaines plus tard, le caricaturiste Gado avait également été contraint à la démission par le NMG, pour ses critiques réitérées du président qui avait porté plainte contre lui. Il travaillait pour le groupe depuis plus de 20 ans.

L’indépendance des médias est régulièrement mise à mal au Kenya, notamment en période électorale. En janvier dernier, la Corporation des directeurs de médias du Kenya (The Kenya Editors’ Guild) s’était dite très inquiète de la tendance du gouvernement à “museler ou à menacer les médias lors de leur couverture d’événements politiques dans le pays”.

Le Kenya occupe la 95e place sur 180 dans le classement mondial 2017 de la liberté de la presse établi par RSF.

Source: RSF