OPINION. Rarement dans le monde les droits des femmes et des filles n’auront été autant mis en cause qu’en Afghanistan. Les derniers développements dans le pays suscitent de vives inquiétudes. L’aide au développement que l’UE accordera à l’Afghanistan sera subordonnée au respect du cadre juridique international et des normes relatives aux droits de l’homme, y compris aux droits des femmes et des filles. L’UE est déterminée à continuer de soutenir les femmes et les filles d’Afghanistan et du monde entier. Par Josep Borrell, Haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et Jutta Urpilainen, Commissaire en charge des partenariats internationaux.

Avec les droits de l’homme, la liberté et la démocratie, l’égalité constitue une des valeurs fondamentales qui font l’essence de l’Union européenne. Elle enrichit nos sociétés et renforce leur résilience. L’égalité entre les femmes et les hommes est un élément essentiel de la paix, de la sécurité, de la prospérité économique et du développement durable. De plus, défendre et promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes est une obligation qui découle des traités de l’UE.

Œuvrer à promouvoir et préserver les avancées en matière d’égalité entre les femmes et les hommes constitue dès lors une priorité politique et un objectif essentiel pour l’UE. Le troisième plan d’action de l’Union européenne sur l’égalité entre les hommes et les femmes et le nouveau budget de l’UE pour l’action extérieure offrent une feuille de route vers un monde où les hommes et les femmes sont égaux. Nous collaborons étroitement avec les partenaires multilatéraux, régionaux et bilatéraux, et notamment avec la société civile, pour atteindre ces objectifs. Nous avons encore un long chemin à parcourir. Nous serons toutefois plus forts ensemble à l’heure d’affronter les nombreux défis restants.

Dans de nombreux pays, la crise de la COVID-19 a exacerbé les inégalités en matière d’égalité hommes-femmes existant dans divers domaines: éducation, formation professionnelle, santé, sécurité, santé et droits en matière de sexualité et de procréation, prise de décision et perspectives économiques. Les confinements liés à la pandémie ont souvent été marqués par une augmentation de la violence à caractère sexiste, en particulier de la violence domestique, tandis que l’accès des femmes et des filles aux services de santé en matière de sexualité et de procréation a été réduit.

Dans le même temps, une part importante de la charge des soins a pesé sur les femmes et les filles. Les travailleurs de l’économie informelle et ceux occupant des emplois peu qualifiés (dont une majorité de femmes), les migrants et les personnes appartenant à des minorités ont été davantage menacés et sont exposés à des formes de discrimination multiples et croisées.

En outre, les fermetures d’écoles ont exposé les filles à un risque accru d’exploitation sexuelle, de grossesse précoce, de travail des enfants et de mariage forcé. Les gestionnaires du Fonds Malala estiment que 20 millions de filles supplémentaires risquent d’abandonner l’école, pour s’ajouter au nombre total de 150 millions de filles (soit l’équivalent d’un tiers de la population de l’UE) sans perspectives d’études.

Selon un récent rapport des Nations unies, en 2020, les dépenses militaires supplantaient encore les dépenses mondiales en matière de santé, même au cours d’une année dominée par la pandémie de coronavirus. Pour sortir durablement de la pandémie de COVID-19, nous devons redoubler d’efforts pour promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes.

L’heure est venue d’en faire davantage

Ce défi exige une action mondiale et doit être relevé dès maintenant, à l’heure où nous construisons l’avenir dans lequel nous souhaitons voir nos enfants et petits-enfants grandir dans un monde d’après-pandémie plus égalitaire, plus ouvert à la diversité et où l’égalité des chances est une réalité. Nous devons nous attaquer aux causes profondes de l’inégalité entre les hommes et les femmes et des discriminations sexuelles afin d’instaurer un changement durable.

L’Union européenne et ses États membres, ainsi que les institutions financières européennes, ont soutenu les femmes et les filles du monde entier pendant la pandémie. En tant qu’Équipe Europe, nous avons déjà mobilisé 46 milliards d’euros en faveur de plus de 130 pays partenaires, en accordant la priorité aux femmes et aux jeunes.

Ainsi, au Népal, nous avons aidé un million de filles et de garçons à poursuivre leur éducation grâce à un apprentissage par la radio. Au Togo, nous avons soutenu la création d’un système de revenu universel et la nomination de femmes à la tête de nouvelles municipalités. Au niveau mondial, l’initiative «Spotlight» de l’UE et des Nations unies a aidé 650 000 femmes et filles à prévenir ou à combattre les violences à leur encontre, et a offert une éducation à 880 000 hommes et garçons sur les thèmes de la masculinité positive, de la résolution non violente des conflits et de la parentalité.

Il n’en reste pas moins que nous devons faire plus et mieux pour relever des défis de plus en plus importants. Telle est la finalité du troisième plan d’action sur l’égalité entre les hommes et les femmes. Ce plan promeut l’accession des femmes, des filles et des jeunes aux responsabilités et une participation significative à la vie politique, économique, sociale et culturelle, ainsi qu’à toutes les questions liées à la paix et à la sécurité, et ce partout dans le monde.

Nous nous employons à remettre le développement humain sur les rails

Nous concrétisons en ce moment ce plan avec l’appui du nouvel instrument IVCDCI – Europe dans le monde, doté d’un budget de 79,5 milliards d’euros, qui appuiera l’action extérieure de l’UE au cours des sept prochaines années.

Le soutien à l’éducation, et en particulier à l’éducation des filles, occupera une place centrale. De la même manière que nous soutenons l’éducation dans les situations d’urgence, l’UE a collaboré avec les pays partenaires tout au long de la pandémie pour réduire autant que possible ses effets sur l’apprentissage et le bien-être des enfants et pour favoriser un retour à l’école en toute sécurité.

Nous fournissons déjà plus de la moitié de l’aide mondiale en faveur de l’éducation en tant qu’Équipe Europe. Mais nous allons encore augmenter ce concours financier, afin de promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes grâce à une éducation de qualité à tous les niveaux. L’engagement commun de 1,7 milliard d’euros en faveur du Partenariat mondial pour l’éducation que nous avons promis en juillet – afin de transformer l’éducation des filles et des garçons dans un maximum de 90 pays et territoires – s’inscrit dans le cadre de ce nouveau départ.

Nous multiplions nos efforts à tous les niveaux, qu’il s’agisse de soutenir l’éducation et les débouchés économiques des femmes et des filles ou d’améliorer leur accès aux services de santé en matière de sexualité et de procréation. D’ici à 2025, 85 % de l’ensemble des nouvelles actions extérieures de l’UE, dans tous les secteurs, contribueront à l’égalité entre les femmes et les hommes et à l’émancipation des femmes.

Nous finalisons cet effort en ce moment avec nos pays partenaires, sur la base d’une consultation étroite des organisations de la société civile, des défenseurs des droits des femmes et des jeunes.

Nous devons remettre le développement humain sur les rails et atteindre les objectifs de développement durable d’ici 2030, en veillant à ne laisser aucune femme ni aucune fille au bord de la route. Il est essentiel que nous réussissions.

Avec Tribune.fr