Dans une atmosphère lourde de préoccupations, le Syndicat des Professionnels de la Presse de Guinée (SPPG) a levé le voile sur un rapport alarmant sur l’état de la liberté de la presse en Guinée. Présenté ce mardi 4 février 2025, à la Maison de la Presse de Conakry, en présence de nombreux journalistes des médias nationaux et internationaux, le rapport annuel dresse un constat inquiétant courant l’année 2024, qui restera gravée dans les mémoires comme celle d’un véritable « obscurantisme médiatique ».

C’est Sékou Jamal Pendessa, secrétaire général du SPPG, qui a présenté officiellement le rapport. Un rapport mettant en lumière la gravité des attaques subies par la presse guinéenne au cours de l’année écoulée.

Un sombre tableau : 70 atteintes graves recensées

Intitulé « 2024, année d’obscurantisme en Guinée », le rapport du SPPG, le troisième du genre, révèle une explosion des violations des droits des journalistes. Entre le 1er janvier et le 31 décembre 2024, 70 atteintes graves à la liberté de la presse ont été documentées, contre 23 en 2023, soit une augmentation vertigineuse de 204 %.

Dans les détails, 32 journalistes ont été victimes de séquestration, tandis que 16 ont été arrêtés arbitrairement. Parmi eux, deux ont été incarcérés à la Maison centrale de Coronthie après des gardes à vue prolongées. Ces chiffres illustrent une répression de plus en plus systématique à l’encontre des voix dissidentes.

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Agressions physiques et exil forcé

L’année 2024 a également été marquée par des actes de violence physique. Deux journalistes d’un média public ont été brutalement agressés par des militaires à Conakry. L’un d’eux a subi des blessures graves, dont une épaule droite déboîtée suite à la violence des coups.

Les menaces se sont intensifiées avec des tentatives d’enlèvement ciblant des professionnels des médias. Le 3 décembre, un journaliste a été kidnappé en haute banlieue de Conakry, illustrant un climat d’insécurité grandissant pour les travailleurs de l’information. Cette situation a poussé au moins quatre journalistes à fuir le pays avant la fin de l’année, cherchant refuge à l’étranger face à l’absence de garanties de sécurité sur le sol guinéen.

Judiciarisation de la répression et mesures administratives liberticides

Sur le plan judiciaire, le rapport révèle que deux des trois procédures engagées contre des journalistes ont été instruites sur la base du Code pénal, au détriment de la loi sur la liberté de la presse qui devrait les protéger contre des peines de prison. Cette tendance à criminaliser l’exercice du journalisme fragilise davantage un secteur déjà en difficulté.

Les restrictions ne s’arrêtent pas là. Quatre radios privées et deux chaînes de télévision ont été fermées par le ministère en charge de l’Information depuis mai 2024, accompagnées de la suspension de deux sites d’information et de trois journalistes sanctionnés par la Haute Autorité de la Communication (HAC) pour des durées allant de trois à neuf mois.

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Conakry, épicentre de la répression

La capitale guinéenne, Conakry, concentre à elle seule 67 des 70 violations recensées, soit 95,71 % des cas. Un triste record pour la troisième année consécutive. La région administrative de Kankan arrive en seconde position, avec trois cas répertoriés : un à Kankan-ville et deux à Mandiana.

Un appel à la résistance face à la dérive autoritaire

Dans son discours, Sékou Jamal Pendessa a dénoncé une « régression sans précédent des acquis démocratiques en matière de liberté de la presse » et a exhorté les autorités à garantir un environnement sûr pour les journalistes.

Face à cette situation, il est important de rappeler les mots de George Orwell : « La liberté de la presse, c’est la liberté de dire aux gens ce qu’ils ne veulent pas entendre. »

Ce constat doit interpeller non seulement les autorités guinéennes, mais aussi la communauté internationale, les organisations de défense des droits de l’homme et tous les acteurs engagés en faveur de la démocratie. La liberté de la presse est un pilier fondamental de toute société libre. La Guinée ne doit pas l’oublier.

Ibrahima Foulamory Bah, pour lecourrierdeconakry.com

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