Le procès en appel de Dr Mohamed Diané, ancien ministre de la défense nationale sous le régime de l’ex-président Alpha Condé, s’est ouvert ce jeudi 6 mars 2025 devant la chambre des appels de la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF). Poursuivi par l’État guinéen pour détournement de deniers publics, enrichissement illicite et corruption, Dr Diané réitère son innocence face aux lourdes accusations portées contre lui.
Dès l’ouverture de l’audience, la décision rendue en première instance a été rappelée. Le juge Daye Mara a ensuite donné la parole aux avocats du prévenu, qui contestent fermement la sentence.
Me Almamy Samory Traoré, avocat de la défense, a pointé du doigt un manque d’impartialité dans le verdict initial. Il a notamment dénoncé l’absence de prise en compte de la déclaration de biens de son client ainsi que le fait que Dr Mohamed Diané n’ait pas été entendu lors des audiences d’instruction.
De son côté, Me Pépé Antoine Lamah, représentant de l’État, a estimé que les charges retenues contre l’ancien ministre ne sauraient être remises en cause, insistant sur la gravité des infractions poursuivies.
Appelé à la barre, l’ancien ministre de la défense de nationale a pris la parole pour réaffirmer son innocence et critiquer le traitement de son dossier.
« Ma présence ici ne relève pas seulement de ma défense personnelle, mais aussi d’une quête pour la justice, l’équité et le respect des droits fondamentaux. Les accusations portées contre moi ne reposent sur aucune preuve tangible ni base juridique solide. »
Il a également mis en avant les irrégularités qui, selon lui, ont entaché l’ensemble de la procédure, depuis l’enquête préliminaire jusqu’au verdict.
Dr Diané s’est insurgé contre l’absence de preuves concrètes concernant le détournement de fonds qui lui est reproché.
« Aucun montant précis ne m’a été reproché au cours de l’enquête préliminaire ni devant les magistrats instructeurs. Curieusement, c’est seulement lors de la plaidoirie que l’Agent judiciaire de l’État a avancé une somme de 500 000 milliards de GNF, sans fournir la moindre preuve documentaire. Comment peut-on condamner un homme sans déterminer clairement ce qu’il aurait détourné et à quelles fins ces fonds auraient été utilisés ? »
En matière de détournement de deniers publics, la charge de la preuve incombe au ministère public. L’ancien ministre estime que son dossier repose sur des allégations vagues et non étayées, en violation des principes fondamentaux du droit pénal.
Il a par ailleurs souligné que plusieurs biens qui lui sont attribués ne lui appartiennent pas et rappelle qu’il a effectué en toute transparence ses déclarations de patrimoine devant la Cour suprême en 2011 et la Cour constitutionnelle en 2016, mais que ces éléments n’ont pas été pris en compte dans le jugement en première instance.
Face aux interrogations sur les budgets du ministère de la Défense, Dr Mohamed Diané a présenté un détail des montants alloués entre 2015 et 2020 :
2015 : 1 000 milliards 657 millions 338 mille 517 GNF
2016 : 1 000 milliards 450 millions 831 mille 589 GNF
2017 : 1 000 milliards 564 millions 668 mille 006 GNF
2018 : 1 000 milliards 526 millions 701 mille 503 GNF
2019 : 1 000 milliards 794 millions 101 mille 307 GNF
2020 : 200 milliards 008 millions 777 mille 657 GNF
Il a ensuite insisté sur le fait que la gestion effective de ces fonds incombait à l’intendance militaire. « Avant mon arrivée, le budget de la Défense n’était pas présenté en plénière, mais uniquement en commission. J’ai exigé plus de transparence en défendant le budget devant l’Assemblée nationale. Une fois le budget voté, sa gestion relève de l’intendance militaire. Je ne peux donc répondre sur son exécution sans leur présence. Pourquoi refuser d’entendre les intendants ? »
Après ces débats, le juge Daye Mara a accédé à la demande des avocats de la défense et a renvoyé l’audience au 20 mars 2025 pour la suite des discussions.
En conclusion, Dr Mohamed Diané a réaffirmé sa confiance en la justice et a exhorté les juges à réexaminer son dossier avec impartialité.
« Un procès équitable ne peut se fonder sur des allégations non étayées, des preuves absentes et des inégalités aussi flagrantes. J’espère que la justice rétablira la vérité et réparera cette injustice. »
Foulamory Bah