Reporters sans frontières (RSF) vient de dresser le tableau de la situation de la liberté de presse à travers le monde. Dans son cru 2016, notre pays est pointé à la 108ème place sur 180. Mais ce sont les arguments avancés par RSF pour justifier ce classement qui méritent des observations.

Sous le titre « Les journalistes dans la tourmente » il est allégué qu’ « en Guinée, le régime du président Alpha Condé n’est pas tendre envers les médias. Nombre de journalistes ont dû fuir le pays à la suite d’articles controversés. Le gouvernement tente périodiquement de censurer les médias sous des prétextes administratifs (tentatives de fermeture de Espace FM et Espace TV en 2014) ou juridiques (offenses contre les institutions, publications de « fausses nouvelles »). Le président tient souvent des propos sévères envers les médias nationaux, internationaux et les organisations de défense de la liberté de la presse ». Encore que ces extraits ne sont que de la deuxième version du rapport de RSF, la première se révélant plus scandaleuse, car évoquant des faits aussi décalés que la tuerie des journalistes de Womey qui date plutôt de 2013. Comme pour dire que nos réactions ont dû amener RSF à édulcorer son pamphlet. (Sic !).

Pour ne pas donner dans la polémique, j’avise que comme moi, tous les professionnels de la presse et des medias auraient applaudi à tout rompre si les affirmations de RSF étaient fidèles à la réalité du terrain. Tous et chacun ont en partage cette infinie satisfaction du rôle de veille de RSF et de ses prises de positions illustrées par des enquêtes incontestables. A contrario, cette fois, faute de se documenter à la source, nos confrères se sont littéralement fourvoyés en se fondant sur des clichés.

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Ma surprise n’en est que plus grande qu’à l’Union des radiodiffusions et télévisions libres de Guinée (URTELGUI ) -dont j’assume la présidence – et qui par ailleurs constitue un échantillon fortement représentatif du paysage audiovisuel, RSF n’a jamais mené le moindre contact pour avoir notre point de vue sur la situation de la presse guinéenne.

Et je suis loin de penser qu’une quelconque démarche ait pu être envisagée envers nos confrères de l’AGEPI ou de la presse en ligne. Serions-nous tous dans la tourmente au point d’ignorer notre mal ? Des bougres ou tout bonnement des stoïques, insensibles à la maltraitance dont ils seraient victimes…Ou encore la petite chose du prince ? Que non mille fois évidemment.

En tous les cas, pour ce coup, les louables dispositions de RSF ont engendré l’effet sur lequel il faudrait s’attarder. D’une part, les contre- vérités servies ont été si grossières qu’elles ont été du pain béni pour le gouvernement. Lequel d’ailleurs n’avait pas à s’en préoccuper outre mesure. Aux journalistes et à l’opinion d’en juger à tout loisir se serait-il simplement dit. Et c’est manifestement ce qui domine et l’emporte sur tout. Car quoi qu’on en dise, pour les journalistes que nous sommes, le contexte est désarmant. La raison en est que notre bon veilleur de RSF vient ainsi de semer de sérieux doutes sur ses aptitudes de jugement. De la à dire qu’il a perdu de la cote, je ne franchirais pas le pas. Mais tout compte fait, j’invoquerai un dicton guinéen qui dit que « menteur n’est jamais écouté même quand il dit la vérité ». Pour tout dire, le plus grand mal que je souhaiterai à RSF, c’est que nos confrères se débarrassent des préjugés et autres clichés, pour faire preuve de rigueur, cette valeur si chère à notre profession.

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Sanou Kerfalla Cissé

 

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