L’interruption volontaire de grossesse (IVG) n’est pas encore un droit acquis pour les Guinéennes. L’avortement n’est autorisé en Guinée que si la vie de la femme est en danger, lorsque la grossesse est due à l’inceste ou de viol, le cas d’une grossesse précoce ou bien l’enfant à naitre est menacée par une affection gravée.
Interrompre une grossesse en Guinée est défendu par la loi. A 20 ans, Aicha Kourouma a fait 3 avortements à l’insu de ses parents et pas forcément dans les meilleures conditions.
« Toutes les fois, c’est une copine qui m’a accompagné chez son gynécologue. J’ai payé 500 milles francs. Je n’ai pas pu le dire à ma mère parce que la dernière fois, c’était la veille du baccalauréat. » confie Aicha Kourouma.
C’est un acte illégal aux yeux de la loi. Maître Adama Skel Bangoura avocat à la Cour d’Appel de Conakry, rappelle l’article 262 qui condamne les auteurs de cette infraction.
Le code pénal guinéen balise les conditions d’exécution de l’avortement. Il faut l’approbation d’un collège de médecins spécialistes qui consignera sa décision dans un procès-verbal justifiant les raisons de l’avortement.
« L’article 263 dit ceci : qui conque par aliment, breuvage, médicament, manœuvre violente ou tout autre moyen sauf le cas autorisé par la loi pour les raisons de santé, procurer ou tenter de procurer de l’avortement d’une femme enceinte ou supposée enceinte qu’elle y ait consenti ou non, est punie d’un emprisonnement d’un à deux ans et d’une amende de 500. 000 gnf à 5 millions de gnf pour l’une de ces deux peines » explique Adama Skel Bangoura.
Poursuivant, il ajoute que s’il est établi que le coupable est un habitué des faits, sa peine est de 2 à 5 ans d’emprisonnement et payera une amende qui varie de 1 à 10 millions de gnf. Si l’auteur de l’avortement est un médecin ou un agent de santé, il sera suspendu de la profession pendant 5 ans et payera une amande 1 à 10 millions de gnf.
Aicha Kourouma et son médecin aurait pu être traduit en justice si ces différents avortements étaient connus de la police.
Souvent, les avortements clandestins en Guinée sont motivés entre autres par les grossesses rapprochées, la peur de représailles des parents du fait de la grossesse survenu hors mariage et l’incapacité à prendre en charge le bébé.
Le cadre légal de l’avortement en Guinée et la grande influence de la religion limite le débat sur l’accès à un avortement sécurisé selon Mme Diawando Hawa Daff.
« En Guinée, les acteurs n’arrivent pas à faire la part des choses entre le cadre légal, la tradition et la religion. C’est un trio qui ne marche pas. Les militantes vous parlent de santé et du droit à posséder sa corp et parfois même le bon moment de faire les choses. C’est un combat qui mérite de dissocier ces facteurs » confie cette militante.
Cet amalgame entre la loi et les traditions ou religions exposent des milliers de guinéennes à des avortements clandestins multiples et leur lot de complications.
20 ans après le Protocole de Maputo, adopté en 2003, les femmes et les jeunes filles guinéennes butent encore à la loi pour accéder au droit à l’avortement.
Monia Briggs