Mercredi 16 octobre 2024, la Cour de Répression des Infractions Économiques et Financières a entamé la phase des plaidoiries et réquisitions dans l’affaire du détournement de 15 milliards de francs guinéens destinés à la construction du nouveau siège de l’assemblée nationale. Dans ses réquisitions, le substitut du procureur de la Cour de Répression des Infractions Économiques et Financières (CRIEF) a demandé à la Cour de déclarer non coupable à l’ex-questeure de l’assemblée nationale, Zenab Camara, accusée dans cette affaire tout en demandant de la relaxer purement et simplement. Ce procès, dont le chef d’accusation est l’honorable Amadou Damaro Camara, ancien président de l’Assemblée nationale sous le régime d’Alpha Condé, se tourne désormais dans sa phase finale.
Dans cette affaire, tout a débuté par des accusations portées contre Zenab Camara (ex deuxième questeure) Amadou Damaro Camara ( président de l’assemblée nationale), Michel Kamano (ex-premier questeur) Camara et l’entrepreneur chinois Sun Cheng Kim, pour le détournement présumé de 15 milliards de francs guinéens. Ces fonds publics étaient destinés à la construction du nouveau siège de l’Assemblée nationale, un projet symbolique de la 9ème législature sous le régime d’Alpha Condé. Cependant, ces ressources auraient été mal gérées ou détournées, plongeant ces hauts responsables dans une tourmente judiciaire de grande ampleur.
Depuis le début de ce procès à la CRIEF, l’affaire est suivie de près par l’opinion publique guinéenne, qui voit dans ce dossier un test pour la justice et la lutte contre la corruption dans le pays. Ce dossier, selon certains hommes avertis, met en lumière les dysfonctionnements dans la gestion des fonds publics, particulièrement sous les régimes précédents, et relance les débats sur la responsabilité des élites politiques face aux actes de malversation pendant leur gestion.
Lors des réquisitions d’hier mercredi 16 octobre, le substitut du procureur de la CRIEF a stupéfait l’audience en demandant la relaxe de Zenab Camara. Selon lui, les preuves à charge ne suffiraient pas pour justifier une condamnation. Ce revirement marque un point important dans l’affaire, où la question de la responsabilité personnelle de Zenab Camara semble être au cœur du débat.
Le procureur a souligné que les éléments de l’enquête ne permettaient pas de prouver l’implication directe de l’ancienne questeure dans le détournement des fonds publics. Cette déclaration fait écho aux déclarations de la défense qui, tout au long du procès, a insisté sur l’absence de preuves tangibles contre leur cliente.
La défense dans sa plaidoirie a sollicité un franc symbolique en faveur de sa cliente
Après la réquisition du ministère public, les avocats de Zenab Camara ont, quant à eux, plaidé pour un dédommagement symbolique d’un franc pour réparer les préjudices moraux et professionnels subis par leur cliente. Pour eux, l’image de Zenab Camara a été ternie par cette affaire, malgré l’absence de preuves directes. Ce franc symbolique devient un geste fort pour marquer la volonté de réhabilitation de la réputation de leur cliente.
Cette demande souligne l’impact considérable que cette affaire a eu sur la carrière et la vie de Zenab Camara. Si la relaxe est accordée, cela marquerait une étape clé dans la réhabilitation de l’ancienne questeure et pourrait avoir des répercussions sur la perception de la justice guinéenne dans les affaires de corruption.
La suite du procès : le 18 octobre, dernière ligne droite
Le procès reprendra vendredi 18 octobre 2024 pour la suite des plaidoiries. Tous les regards seront désormais tournés vers le tribunal, où l’avenir de Zenab Camara, ainsi que celui d’Amadou Damaro Camara, Michel Kamano et Sun Cheng Kim sera scellé. Si la relaxe de Zenab et de Sun Cheng Kim Camara semble de plus en plus probable, la situation reste tendue pour l’ancien président de l’Assemblée nationale et celui du premier ex-questeur, qui demeure sous le coup d’accusations graves dans cette affaire.
D’après des hommes avisés que nous avons pu consulter, la relaxe potentielle de Zenab Camara et de Sun Cheng Kim suscitera des réactions contrastées. Il se peut selon eux, que certains y voient une victoire de l’indépendance de la justice, tandis que d’autres dénoncent une justice à deux vitesses, où les élites échappent aux sanctions. Ce procès pourrait-il avoir des répercussions sur la confiance du public envers la CRIEF et plus largement envers la justice guinéenne?
En tout état de cause, la gestion des affaires de corruption sous le régime militaire dirigé par le Général Mamadi Doumbouya reste un enjeu important pour la Guinée, et cette affaire emblématique pourrait redéfinir les attentes autour de la lutte contre les crimes économiques. Si Zenab Camara Sun Cheng Kim sont relaxées, la question de la responsabilité dans la gestion des fonds publics sera posée plus que jamais.
Autres aspects importants à souligner, cette affaire des 15 milliards de francs guinéens met à l’épreuve la capacité de la Guinée à juger ses élites politiques avec impartialité et rigueur. La relaxe demandée par le procureur pour Zenab Camara et Sun Cheng Kim pourrait être vue comme une victoire de la justice, ou au contraire, comme une preuve de l’impunité des figures de l’ancien régime. L’issue de ce procès, prévue pour le 18 octobre, sera déterminante pour l’avenir de la lutte contre la corruption en Guinée.
Ibrahima Foulamory Bah pour lecourrierdeconakry.com