La phase décisive des plaidoiries du procès du 28 septembre a pris fin ce mercredi 26 juin au tribunal de première instance de Dixinn, délocalisé à la Cour d’Appel de Conakry. En attendant le verdict final du juge, Ibrahima Sory 2 Tounkara, prévu le 31 juillet prochain, les principaux accusés dont le capitaine Moussa Dadis Camara, le Commandant Aboubacar Sidiki Diakhité, dit Toumba et le Colonel Moussa Tiégboro Camara se sont une nouvelle fois exprimés à la barre.

Dans leurs interventions, ils ont plaidé non coupable d’être auteurs ou commanditaires des évènements au stade du 28 septembre en 2009, ils ont remercié les autorités d’actuelles d’avoir réussi à organiser ce procès en Guinée. Le capitaine Dadis et le Colonel Tiégboro ont fustigé certains propos et attitudes des avocats de la partie civile et le parquet. Quant au Commandant, il a demandé aux dirigeants de tirer les leçons de ce procès afin d’éviter un tel évènement dans le pays. Sur ce, il a affirme faire regulièrement des prières pour toues les victimes.

Voici le contenu de leurs déclarations décryptées par Africa Guinée

Capitaine Moussa Dadis Moussa Camara :

« Je suis un homme qui écoute. Il était question que je vienne en quelque peu de mots pour faire ma déclaration, mais je suis choqué par un des éminents avocats de la partie civile en l’occurrence maître Gilbert lorsqu’il a tenté d’entacher après toutes les plaidoiries de ma défense, en disant des propos infondés pour troubler l’esprit de votre Tribunal. Lorsqu’il dit que c’est moi qui ai envoyé Toumba au stade, alors que ce dernier et son avocat ont été clairs. Ce sont des faits. Je tombe du ciel. Étiez-vous là quand le commandant Toumba passait ? On va se défendre (…) », a martelé l’accusé.

Je suis bouleversé et estomaqué

Et de poursuivre : « Il y a treize ans de cela, je suis au Burkina Faso. J’étais dans mes droits de demander la nationalité. Mais je suis un officier assermenté qui se caractérise par l’honneur et la dignité. J’ai été Président pas par ma force, ni par mon intelligence, mais par le fait du destin. J’ai toujours imploré Dieu en disant, si j’ai frôlé la mort d’un micron près, de me donner vie jusqu’à ce procès (…). Je suis bouleversé, estomaqué par les propos détournés de maître Gilbert. On est dans un procès pénal. On ne doit déformer les propos des accusés. C’est une infraction notoire », a martelé Dadis Camara.

Nous ne sommes pas dans une salle de théâtre, mais dans une salle d’un tribunal criminel. Les faits sont sérieux. Ce qui s’est passé au stade 28 septembre est crapuleux. Quand le Procureur Sidiki a tenté de prendre sa soi-disant (e) preuve…quelle preuve avez-vous contre moi ? Quelle preuve avez-vous apporté ici ? Le procès pénal, ce ne sont pas des hypothèses, disait Éric Dupont-Moretti (actuel ministre de la Justice en France). Ce ne sont pas des déductions, des imaginations. Avez-vous des preuves des huit chefs d’accusations qui ont été discutés ici ? J’ai beaucoup appris ici.

Monsieur le Procureur, vous étiez passé à Marocana, vous avez écrit à Ambroise Paré…vous n’avez aucune preuve pour assoir la conviction du président du tribunal. Ça ne marchera pas. Vous voulez insidieusement passé par cette histoire de requalification, parce que vous n’avez pas de preuve, ni aidé le président. Si vous avez des preuves, amenez-les pour qu’on puisse les discuter contradictoirement devant le Président du tribunal. Vous voulez passer par cette requalification. On ne peut pas se fonder sur des déclarations imaginaires pour assoir la conviction d’un président.

Responsabilité de commandement

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On parle de responsabilité de commandement. Vous voulez créer un précédent en Guinée. Autrement dit, tous les anciens présidents passeront un jour (devant le tribunal) parce qu’il n’y a pas un seul dont le régime n’a pas enregistré de morts. Vous voulez créer des précédents au président Doumbouya. Il faut que je vous le dise. Ça ne marchera pas. Je suis convaincu, monsieur le Président, que personne ne vous induira en erreur. Monsieur le procureur Sidiki, vous n’avez pas aidé le Pésident. » a-t-il martelé.

Commandant Aboubacar Sidiki Dialhité Toumba

« Je voudrais que ce procès puisse servir à l’armée parce que la plupart des évènements que notre pays a connus sont dus à l’incompréhension entre l’armée (forces de défense et de sécurité) et le peuple qu’elle est censée protégée. Il faut que ceux qui nous écoutent, puissent tirer l’expérience à travers ce jugement. La population civile ne mérite pas ce qu’elle est en train de connaître. Même le pouvoir en place doit en tirer les leçons puisque tout pouvoir est éphémère. On doit respecter le peuple », a-t-il lancé.

« Je ne considère personne ici comme ennemi, tout ce qui m’arrive était préétabli dans l’organigramme divin. Tout ça allait arriver. Je continue à prier pour l’âme des personnes disparues, que Dieu les accueille dans son firdawsh. J’élargis cette prière à toutes les victimes des manifestations politiques dans notre pays jusqu’aux victimes du camp Boiro », a lancé l’officier pour lequel le parquet avait requis 15ans de réclusion criminelle.

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« On a beaucoup appris de ce procès. Je prie que notre pays ne connaisse plus un tel évènement et que Dieu protège notre pays, qu’il fasse que les guinéens marchent ensemble main dans la main, dans la paix et la réconciliation. »

 

Colonel Moussa Tiégboro Camara

« Monsieur le président du tribunal, je voudrais sincèrement remercier monsieur le Président de la République, (le général Mamadi Doumbouya). Je commence par lui avant ma mère pour quoi ? Je commence par lui parce qu’il a eu le courage, c’est aussi un ami. Le jour où je lui ai parlé de ce procès, le bruit a commencé, on s’était vus, il m’a dit : ( kèh= homme), ce procès est indispensable. Je lui ai dit que c’est indispensable. Pour moi, je suis sur sa ligne. Si je mourais aujourd’hui, mes enfants n’auraient pas le temps de se regarder en face. On vit pour l’honneur et la dignité. Je lui ai dit mon cher ami, si vous avez les moyens, il faut y aller. Je suis sorti de son bureau », a révélé le colonel Tiegboro à la barre.

Arrivé à la maison dira-t-il, « j’ai dit à madame, enfin, Hadja, cette fois-ci, je pense qu’après tant d’années de combat, ce jugement aura lieu. Elle en était très préoccupée. Elle m’a dit est-ce que vous croyez à ces juges guinéens ? Que ce soit devant la CPI, ou la justice guinéenne, on demande toujours les preuves. Un procès pénal c’est toujours les faits et les preuves. Je lui ai dit de me laisser aller. Car j’ai confiance en mes avocats », a relaté l’officier.

Nous avons beaucoup entendu. Je pouvais m’attendre à tout dans ma vie, même une crise cardiaque, une mort subite, mais je n’imaginais jamais qu’un jour, je serai devant la barre pour écouter les parties civiles, les avocats, la défense, écouter des procureurs avec lesquels j’ai tant travaillé, parler de moi comme si ce n’était pas le colonel Tiegboro.

Je voudrais sincèrement adresser mes condoléances à toutes les victimes car quoi qu’il arrive il y a un fait : il y a eu des morts, des blessés mais par l’œuvre de qui ? Est-ce le colonel Tiegboro après tant d’années de lutte contre le grand banditisme, de crime organisé à l’échelle national et international, je me dis non. Comme vous le dites, la loi c’est la loi, elle est difficile (…). Malheureusement, Dieu a voulu ainsi. Que nous soyons des cobayes ou que je sois le cobaye », s’est défendu Moussa Tiegboro Camara.

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