La restriction de l’accès à l’internet et le brouillage des fréquences des radios privent beaucoup de guinéens de leur droit à l’information. Cela s’ajoute également à l’interdiction des manifestations sur la place publique et autres violations de droits de l’homme.
Approché par un reporter du Courrier de Conakry, Alseny Sall, porte-parole de l’Organisation Guinéenne des Droits de l’Homme (OGDH) est revenu sur cette situation inquiétante. Il estime que les organisations des droits de l’homme et les médias doivent travailler ensemble pour changer la donne. Lisez son interview accordée à notre média.
Le Courrier de Conakry : Les violations des droits de l’homme ne font que s’aggraver en Guinée, les manifestations notamment sont interdites. Qu’en pensez-vous ?
C’est ce qui démontre que nous sommes aujourd’hui dans une logique de restriction progressive des libertés. Cela à commencer par l’interdiction des manifestations, ensuite nous assistons à la restriction de la liberté d’expression. Ce sont des signaux inquiétants pour les droits de l’homme. Il faut continuer à travailler pour faire changer cette situation.
Avez-vous une idée sur les raisons de la restriction de l’accès aux réseaux sociaux et le brouillage des radios privées ?
Pour le moment, on n’a pas les informations liées à ces restrictions. Justement c’est ce qui est inquiétant avec cette situation. Nous sommes d’accord que les organisations des médias soient soumises à des règles et des principes dans leur fonctionnement. Donc, lorsqu’il y a des manquements, ces organisations doivent faire l’objet de sanctions. Mais si cela doit se faire, c’est avec des canaux officiels. On doit vous dire que vous avez manqué à cette règle. Puis, on engage une procédure contre vous, soit devant la HAC ou devant un tribunal. Malheureusement, aujourd’hui les organisations des médias rencontrent des difficultés de fonctionnement. Elles ont tapé à toutes les portes au niveau des autorités mais personne ne répond. Cela nous inquiète. Parce qu’au-delà du droit à l’information des populations, il y a aussi des menaces des emplois des hommes de médias.
Selon vous, est-ce que la Guinée risque des sanctions ?
Les sanctions internationales ne viennent pas comme ça, mais la Guinée peut perdre des points vis-à-vis de ses partenaires internationaux notamment ceux qui tiennent aux respects des droits fondamentaux des citoyens. La plupart des grandes démocraties occidentales conditionnent leur accompagnement financier ou leur investissement dans les Etats par le respect de certains principes et valeurs. Donc si, la Guinée ne respecte pas les engagements, elle pourrait ne pas bénéficier des ressources de l’accompagnement de ces pays sur le plan politique. Mais sur des questions de violations concrètes, je pense que là, il faut passer par des plaintes au niveau national, régional et international.
Suite à la restriction de l’accès à l’internet et le brouillage des radios privées, comptez-vous porter plainte contre les autorités de la transition ?
Nous sommes en train de travailler mais espérons qu’on n’en arrive pas là. Parce que tout ça pour nous, c’est l’image de la Guinée qui va être affectée. Nous voulons tous sortir de cette transition et qu’elle soit conduite de manière apaisée. Pour le moment, on a tiré la sonnette d’alarme. Il faudrait que les médias et les organisations des droits de l’homme travaillent ensemble pour la défense de la liberté d’expression et ramener à la raison l’Etat pour que cette situation change rapidement.
En tant que membre de l’OGDH, quel est votre message ?
Nous disons aux autorités, il faut qu’on respecte nos engagements en matière des droits de l’homme. Parce que l’Etat a souscrit librement à ces instruments juridiques internationaux. Nous sommes dans un contexte de transition où l’information est importante. Les populations ont besoin d’être informées sur la transition et la conduite de la vie de la nation. C’est pourquoi, nous attirons l’attention des autorités de la nécessité de respecter nos engagements mais aussi de faire respecter le droit de l’information à la population. L’Etat doit surtout préserver l’emploi des jeunes qui travaillent dans les médias où qui gagnent leur vie à travers les réseaux sociaux.
Propos recueillis par Ibrahima Bah