L’homme d’affaires guinéen Mamady Kallo a été arrêté et emprisonné sous la transition dirigée par l’ex-chef de la junte militaire au pouvoir, le capitaine Moussa Dadis Camara, pour trafic international de drogue. Une affaire qui a bouleversé toutes les activités du mis en cause.
Dans une interview que monsieur Kalo a accordée à Depecheguinee, cet ancien pensionnaire de la Maison centrale de Coronthie a fait de graves révélations sur le régime de Dadis. Il dénonce les tortures
dont il a fait l’objet pour lui soutirer des aveux et des biens.

Depuis le début du procès du massacre du 28 septembre 2009, son nom est souvent cité par les avocats de la défense comme étant l’une des victimes de pillages sous le CNDD. Ce chef d’entreprise, Directeur général de la société de construction la Guinéenne de la promotion de la construction immobilière depuis 2006 a décidé de briser son silence. D’après les explications de monsieur Kalo, c’est depuis Dakar, capitale sénégalaise, qu’il a été informé à travers un de ses amis, qu’il est cité dans une affaire de drogue par les autorités en place dirigée à l’époque par le Capitaine Moussa Dadis Camara. Une accusation que monsieur Kalo trouve inadmissible. Il a, à cette occasion, décidé de faire demi-tour vers Conakry pour se blanchir, car pour lui, il estime qu’il ne reprochait de rien.

Après sa descente de l’avion à l’aéroport international de Conakry, quand il a pris la route pour rejoindre son domicile, il dit avoir constaté qu’il était filé par deux véhicules jusqu’à ce qu’il rentre dans sa maison. C’est ainsi qu’il a été réveillé à 4 h du matin, explique-t-il par les cris de son gardien. C’est ainsi qu’ il s’est levé de son lit de sommeil, et a aperçu son gardien en train d’être ligoté et son domicile complètement encerclé par neufs pickups bien équipés garés à l’extérieur. Des soldats encagoulés dirigés par le Colonel Kalonzo ont pénétré dans sa maison et procédé à son arrestation avant de passer à des fouilles. Il indique que c’est le Colonel Kalonzo qui lui a demandé de faire sortir la drogue qu’il détient dans sa maison ? Il leur a demandé de fouiller toutes les pièces de sa maison s’ils vont voir de la drogue. C’est ainsi, précise-t-il, qu’ils ont fouillé partout, sans et pourtant trouvé quelque chose. C’est ainsi, poursuit, il a été embarqué de force pour l’emmener au camp Alpha Yaya Diallo où il a été sauvagement torturé dans un conteneur qui était devant un bâtiment à la sortie du Camp vers Yimbaya. Il révèle qu’il avait trouvé d’autres militaires de l’ex-garde présidentielle de feu général Lansana Conté qui étaient aussi détenus dans ce conteneur. Ils m’ont enchaîné sur un lit. Je suis resté assis sur ce lit jusque tard la nuit. Ils m’ont conduit à la Gendarmerie de Yimbaya où ils m’ont mis dans une cellule. Le lendemain, vers 11 heures, ils m’ont ramené encore au camp. J’ai trouvé Mathurin Bangoura enchaîné à un lit. C’est ainsi qu’ils nous ont enchainés ensemble. On est resté assis toute la journée jusqu’au lendemain. Après, on nous a amené derrière le bâtiment de Dadis où on nous enchaînait toutes les nuits. Parfois, on m’enchainait avec Mathurin, et parfois, avec Charles Pascal. On dormait enchaînés des mains et des pieds. Même pour aller aux toilettes, on était enchaînés.  Tu te fais accompagner par ton partenaire de menotte. Et pendant la nuit, ils viennent chercher une personne parmi nous pour le torturer dans une salle en présence de Thiégboro, Kalonzo, le Commissaire Fabou, Blaise, Goumou, Mansaré, Sow, qui travaille actuellement à la DPJ pour qu’on montre le reste de nos biens. Oui, on me menottait, les mains derrière liées au dos sur une chaise, et ils inclinaient la chaise. Donc, la menotte se resserrait sur les mains, la douleur était atroce. Tout ça pour obtenir des informations sur nos biens pour pouvoir les prendre. Après quatre mois de détention dans des conditions pénibles parce qu’on dormait menottés pendant tous ces quatre mois, ils nous ont envoyés au PM3 pour nous auditionner avant de nous déférer à la Maison centrale.  Révèle l’homme d’affaire les séances de tortures qu’il a subi par Thiégboro et ses hommes au Camp Alpha Yaya Diallo avant d’être déféré à la maison centrale de Coronthie.

Sélectionné pour vous :  Rôle des médias dans la lutte contre les violences sexuelles : Monique Curtis insiste sur la formation des journalistes

Les conséquences de ces exactions ont été la perte de tous ses biens. Il indique qu’il a perdu tous ses biens qu’il détenait. Près de 60 kilogrammes de lingots d’or, et d’importantes sommes d’argent en devise et en francs guinéens. Des véhicules emportés. Des maisons vidées de leur contenu avant d’être vandalisées. La perte est énorme.

« J’avais tout perdu, tout ce que j’avais comme bien. D’abord, quand ils ont défoncé ma porte, il y avait une valise en métal dans ma chambre qui contenait 45 kilogrammes d’or en lingots et 9 kilogrammes d’or en poudre que j’avais payé en Sierra Leone pour envoyer à Dubaï. Dans mon armoire, Kalonzo a pris 800 000 dollars que les gens ont versés pour les 200 logements, plus de 700 000 euros que je devrais verser à la banque le lendemain. En franc guinéen, il y avait plus de 250 millions. Ils ont tout pris. Le lendemain vers 7 heures, le Colonel Thiégboro et son équipe sont partis à Kobaya où il y avait mon dépôt de fer d’une valeur de 3 millions 800 mille dollars que j’avais payés au Sénégal dans le cadre du projet de construction de 200 logements à Kipé Cité cinquantenaire. Ma maison de Kobaya a été vandalisée et vidée de son contenu. Ils n’ont rien laissé. Dans le coffre-fort de mon bureau, ils ont pris 200 mille dollars, parce qu’on vendait aussi le fer à béton. J’avais 42 véhicules sortis d’usine qui étaient garés dans ma cour à Kobaya, dans un parc automobile que j’ai ouvert pour que l’État paie ses véhicules avec moi. Il s’agit de 17 pickups Toyota Hilux, 15 Fortuner 10 Land cruiser. Mes véhicules personnels et celui de ma maman et mes frères ont été emportés aussi : une vingtaine. Ma société avait des contrats de route aussi. Donc, j’avais quatre poclains, trois bulldozers sortis d’usine que j’avais payés au Togo et deux chargeurs modèles 950, onze semi-remorques qui transportaient mes barres de fer de Dakar à Conakry et onze camions de marque MAN que j’ai payé à Lomé. Ils ont tout pris et jusqu’à nos jours, je ne suis pas rentré en possession de mes objets volés par Thiegboro et ses hommes.

Sélectionné pour vous :  Les meurtres de journalistes ont augmenté de 50% dans le monde en 2022, selon l'Unesco

Au lendemain de mon arrestation, ils sont partis chez ma mère à Lambanyi Waria non loin chez Dadis Camara, ils l’ont enfermée dans les toilettes et ils ont vidé la maison. Ils ont tout emporté, même le balai, ils n’ont pas laissé. Ma maison de Kipé et celle de Taouyah ont toutes été pillées aussi.  Pendant deux semaines, Thiégboro transportait mon fer à béton. La quantité de fer qu’il a exposée au camp ne représente même pas le 3% des fers qu’ils m’ont volés. Il a transporté une grande partie de son chantier vers Sanoyah. Et quand les gens venaient payer le fer avec lui, il les livrait à domicile, dans mes camions. », a-t-il précisé.

C’est pour toutes ces raisons que l’homme d’affaires qui a vécu tous les régimes qui se sont succédés en république de Guinée a conclu tout en indiquant que Le CNDD a été essentiellement caractérisé par la haine, le pillage, le meurtre et le viol. Il se dit très satisfait de l’ouverture du procès des événements du 28 septembre 2009 qui se déroule actuellement à la Cour d’appel de Conakry. Car pour lui seul ce procès qui pourrait édifier davantage le peuple de Guinée sur ce qui s’est réellement passé sous la transition du capitaine Moussa Dadis Camara. Il a à cette occasion remercié le président de la transition actuelle, le Colonel Mamadi Doumbouya.

Ibrahima Foulamory Bah pour lecourrierdeconakry.com
LAISSER UN COMMENTAIRE AVEC Facebook