La plupart de nos institutions sont calquées sur celles de la France. Aucune gêne à le reconnaître. Mais lorsqu’en France des réformes sont apportées aux institutions afin de les rendre plus efficaces, nous, nous restons dans l’immobilisme. C’est le cas de la Haute cour de justice, du Conseil supérieur de la magistrature et de tant d’autres institutions.
À titre d’exemple, les critiques formulées en France contre la Haute cour de justice perçue comme une manifestation d’une justice à deux vitesses ont conduit à son remplacement par la Cour de justice de la République. Mais, même cette dernière aussi est au centre de nombreuses controverses ; certains vont jusqu’à proposer sa suppression pure et simple en estimant qu’il ne devrait pas y avoir de privilège de juridiction pour les membres du gouvernement.
Peut-être que nous ne sommes pas obligés de tout copier sans discernement. Si l’option de la suppression de la Haute cour de justice n’est pas envisageable – du moins pour le moment -, il faudrait au moins qu’elle soit effectivement mise en place et que la procédure à suivre devant elle soit moins compliquée.
Nous sommes prompts à copier les institutions françaises mais rechignons à copier les réformes pour une organisation et un fonctionnement plus efficients de ces institutions.
Si on doit copier, soyons de bons copistes.
Par principe, bon nombre de professionels ou d’acteurs socio-politiques qui s’intéressent aux questions judiciaires ne voient pas d’un bon œil les privilèges de juridiction. Mais, quand les textes prévoient des juridictions d’exception pour une catégorie de personnes par rapport à des actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions, l’État doit au minimum veiller à ce que ces institutions existent et fonctionnent normalement. Sinon, il garantit l’impunité à une catégorie de citoyens parce qu’ils exercent simplement certaines fonctions.
La Guinée est dans cette situation depuis 1991.
C’est d’ailleurs pour surmonter cet obstacle qu’une ordonnance du Président de la Transition a indiqué de manière expresse qu’aucun privilège de juridiction ne peut être invoqué devant la CRIEF.
Parlant de là, plusieurs options s’offrent à notre pays dans ‘’la rectification institutionnelle’’ :
1- On maintient en l’état la Haute cour de justice. Dans ce cas, elle doit exister effectivement et non pas dans les textes seulement. Autrement, ce serait la garantie de l’impunité pour le Président de la République et les ministres. Ces derniers auront ainsi le loisir de demander à être jugés par une juridiction qui n’existe pas.
2- On la maintient en lui apportant les nécessaires modifications pour la rendre plus performante.
3- On la supprime purement et simplement. Ainsi, même pour les actes délictueux accomplis dans l’exercice de leurs fonctions, les ministres seront justiciables des juridictions de droit commun.
Mohamed TRAORE