A l’instar du département américain, l’Amnesty international a publié à son tour le rapport 2022-2023 sur les violences des droits de l’homme en Guinée pendant cette période de transition dirigée par le Colonel Mamadi Doumbouya.

Dans ce document ci-dessous, l’ONG internationale déplore la recrudescence des violences des droits de l’homme. Cela à travers l’interdiction des manifestations, des arrestations arbitraires, des homicides illégaux, violences des femmes et la dégradation de l’environnement.

CONTEXTE

En octobre, le Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD), qui a pris le pouvoir à la suite du coup d’État du 5 septembre 2021, s’est accordé avec la CEDEAO sur une période de transition de deux ans afin de restaurer l’ordre constitutionnel. La date marquant le début de cette transition faisait toutefois l’objet de débats.

LIBERTÉ D’EXPRESSION, D’ASSOCIATION ET DE RÉUNION

Les autorités ont violé les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique. Le 13 mai, le CNRD a annoncé l’interdiction de « toutes manifestations sur la voie publique de nature à compromettre la quiétude sociale et l’exécution correcte des activités contenues dans le chronogramme, […] pour l’instant jusqu’aux périodes de campagnes électorales1 ».

Le 8 août, les autorités ont dissous le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), une coalition d’organisations de la société civile et de partis politiques qui réclamait le retour à l’ordre constitutionnel. La haute-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme a déclaré le 15 août que « de telles actions pourraient constituer des violations des droits à la liberté d’association et de réunion pacifique » et a demandé aux autorités de revenir sur cette décision.

ARRESTATIONS ET DÉTENTIONS ARBITRAIRES

Le 5 juillet, trois dirigeants du FNDC, Oumar Sylla, Mamadou Billo Bah et Djanii Alfa, ont été arrêtés par les forces de police alors qu’ils tenaient une conférence de presse au siège de la coalition à Conakry, la capitale du pays. Après avoir été accusés d’« injures publiques, outrage à magistrat et troubles à l’ordre public et à la sécurité publique » et placés en détention à la prison de Conakry, ils ont été remis en liberté sans inculpation le 8 juillet.

Le 29 juillet, des poursuites ont été ouvertes à l’encontre des organisateurs·trices et des participant·e·s d’une manifestation interdite ayant eu lieu le 28 juillet, au cours de laquelle des violences ont éclaté et cinq personnes ont été tuées. Les dirigeants du FNDC Oumar Sylla et Ibrahima Diallo et le secrétaire général de l’Union des forces républicaines, Saïkou Yaya Barry, ont été arrêtés le 30 juillet, puis inculpés le 1er août de « faits présumés de manifestation illicite, destruction d’édifices publics et privés, provocation à un attroupement, coups et blessures volontaires, association de malfaiteurs, entrave à la liberté de circulation et complicité ». Saïkou Yaya Barry a été libéré à titre provisoire le 12 octobre à la suite d’une détérioration de son état de santé, mais Oumar Sylla et Ibrahima Diallo étaient toujours détenus à la prison de Conakry à la fin de l’année. Ils ont tous deux observé une grève de la faim en novembre pour réclamer la tenue de leur procès.

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HOMICIDES ILLÉGAUX

Thierno Mamadou Diallo, 19 ans, a été tué par des membres des forces de sécurité à Conakry le 1er juin, au cours d’une manifestation contre l’augmentation du prix de l’essence. Le 13 juin, le Parquet a annoncé l’inculpation et le placement en détention d’un policier pour meurtre présumé, ainsi que l’inculpation de quatre autres membres des forces de défense et de sécurité pour « abstention délictueuse » présumée.

Selon la société civile et des organisations de défense des droits humains, en juillet, août et octobre, 13 personnes auraient été abattues par des membres présumés des forces de défense et de sécurité lors de manifestations appelant au retour à l’ordre constitutionnel. Le ministère de la Justice a annoncé l’ouverture d’enquêtes sur ces faits, mais aucune information supplémentaire n’était disponible à ce sujet en décembre.

Le 6 septembre, deux personnes ont été abattues à Kondiaran, dans la région de Kankan, au cours de manifestations violentes contre une entreprise minière accusée de ne pas prendre suffisamment de mesures pour améliorer les conditions de vie locales. Là encore, le ministère de la Justice a indiqué qu’une enquête devait être ouverte, mais aucune information supplémentaire n’était disponible en décembre.

Le 17 septembre, le ministre de la Justice et des Droits de l’Homme a ordonné l’ouverture de poursuites judiciaires pour « homicide volontaire » à l’encontre d’un commandant de police et pour « complicité d’homicide volontaire » à l’encontre de 10 autres policiers après qu’un commerçant du quartier de Kipé, à Conakry, a été abattu pendant une opération de lutte contre les stupéfiants le 17 septembre.

DROITS DES PERSONNES DÉTENUES

Dans une note du 24 juin adressée aux responsables des juridictions et des parquets, le ministre de la Justice et des Droits de l’Homme a déploré « d’horribles réalités notamment au niveau des juridictions et des prisons », qui constituaient des violations de l’Ensemble de règles minima des Nations unies pour le traitement des détenus. Il a souligné, entre autres, « 29 cas de malnutrition sévère et neuf malades mentaux » dans une prison, l’insuffisance et la mauvaise qualité de la nourriture et de l’eau, et «des malades squelettiques, paralysés, voire mourants ». DROIT À LA VÉRITÉ, À LA JUSTICE ET À DES RÉPARATIONS

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Le Procureur général près la Cour d’appel de Conakry a annoncé le 4 mai l’ouverture de poursuites judiciaires à l’encontre de l’ancien président Alpha Condé et de 26 autres personnes, titulaires de postes à responsabilités sous sa présidence pour « atteintes volontaires à la vie humaine notamment le meurtre, assassinat, et complicité de meurtre et d’assassinat », entre autres actes présumés commis dans le contexte du référendum et de l’élection présidentielle de 2020.

Le 28 septembre s’est enfin ouvert le procès des personnes accusées d’avoir pris part au massacre du 28 septembre 2009, lors duquel plus de 150 manifestant·e·s avaient été tués et plus de 100 femmes avaient subi des violences sexuelles. Par conséquent, le Procureur de la CPI a clôturé son examen préliminaire concernant la Guinée, entamé 13 ans auparavant.

VIOLENCES FAITES AUX FEMMES ET AUX FILLES

Les victimes de viol ont continué de faire face à un manque de protection, d’accès et de disponibilité en matière de soins médicaux, de services de santé sexuelle et reproductive, de soutien psychologique et d’assistance juridique et sociale. Malgré de fréquentes campagnes de sensibilisation, les autorités n’obtenaient pas les résultats escomptés en matière de prévention, et les « pressions socioculturelles » pesaient encore lourdement sur les victimes et leurs familles, qui étaient souvent réduites au silence, forcées à accepter des accords extrajudiciaires dans les affaires de viol, et montrées du doigt.

DÉGRADATIONS DE L’ENVIRONNEMENT

Les autorités guinéennes et des ONG ont signalé de graves cas de pollution et des risques de dommages environnementaux et de violations des droits humains dus aux activités minières dans plusieurs régions.

Le 31 janvier, le Premier ministre Mohamed Béavogui s’est rendu à Fria, une ville de la région de Kindia, pour évaluer la situation socioéconomique des travailleuses et travailleurs et constater le niveau de pollution signalé dans la commune où opérait Rusal, une entreprise russe d’extraction de bauxite. À la suite de cette visite, le Premier ministre a ordonné à la direction de Rusal de se mettre en conformité avec les normes internationales en matière de lutte contre la pollution avant le 1er mai.

Amnesty International

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