Consultante en communication, Fatoumata Chérif est également une bloggeuse-activiste et présidente de l’ONG Femmes, pouvoir et développement (Fedep) en Guinée.  C’est à ce titre d’ailleurs qu’elle a récemment pris part, aux côtés de 39 autres jeunes africains, à l’atelier sous régional axé sur le thème : «La jeunesse face aux nouveaux défis sécuritaires en Afrique de l’ouest» tenu à Abidjan et initié par l’Institut de Gorée dans le cadre de son programme «Consolidation de la paix et prévention des conflits en Afrique de l’ouest». Dans cette entrevue, l’heureuse récipiendaire du prestigieux prix ‘‘Femmes leaders d’exception’’ en 2016 décernée par COPE-Guinée dégage l’objectif de cette rencontre et explique les enseignements qu’elle en a tirés. Non sans lancer un appel à la jeunesse ouest-africaine. Lisez !

Le Populaire : Vous rentrez d’Abidjan où vous avez pris part à l’atelier sous-régional initié par l’Institut de Gorée sur le leadership des jeunes dans la prévention et la lutte contre les conflits dans l’ouest africain. Quel était l’objectif de cet atelier?

Fatoumata Chérif : Merci de me donner l’opportunité de restituer l’essence de cet atelier à travers votre médium. Effectivement, je rentre de la capitale ivoirienne où j’ai été ciblée, comme 39 autres jeunes de l’Afrique de l’ouest venus du Bénin, du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, de la Guinée, de la Guinée Bissau, du Mali, du Niger, du Sénégal et du Togo, pour prendre part à l’atelier sur le thème : «La jeunesse face aux nouveaux défis sécuritaires en Afrique de l’ouest» organisé par l’Institut de Gorée de Dakar dans le cadre de son programme «Consolidation de la paix et prévention des conflits en Afrique de l’ouest». L’objectif était d’amener les jeunes à une participation effective à la prévention des conflits et la lutte contre l’extrémisme violent au sein de nos pays respectifs et à travers la sous-région.

Quels sont les acquis de la formation ?

L’atelier nous a permis de renforcer nos capacités sur les thèmes comme la compréhension, l’analyse et les outils d’analyse du conflit et les types d’intervention, la transformation du conflit, la situation des jeunes dans les contextes de radicalisation et d’extrémisme violent, le rôle de la Société civile et de la jeunesse dans les dynamiques nationales de réconciliation en Afrique de l’ouest. Outre les travaux pratiques, l’atelier a été une occasion d’échanger avec des personnes ressources sur les thématiques ‘‘Jeunesse et leadership’’ avec M. Mbaye  Babacar Cissé, Coordonnateur-résident du Système des Nations Unies en Côte d’Ivoire, représentant du Pnud et coordonnateur humanitaire adjoint de l’Onuci, et sur ‘‘la Charte panafricaine de la jeunesse: outil pertinent de prévention des conflits pour les jeunes ouest-africains’’ développée  par M. Traoré Fini Wodjo de la Commission nationale des droits de l’homme de Côte d’Ivoire. A l’issue des trois jours de travaux, une plate-forme de plaidoyer appelée ‘‘Plateforme des jeunes pour la paix, la sécurité et la cohésion sociale en Afrique de l’ouest’’ a été mise en place. Elle vise  la création de synergies fortes en vue d’atteindre les objectifs fixés par les instruments internationaux, régionaux et sous-régionaux relatifs à la responsabilisation de la jeunesse et son implication dans les processus de paix et de sécurité.

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Vous avez été désignée pour lire le protocole d’entente. Qu’est-ce que cela signifie pour vous, en votre qualité d’experte en communication et mobilisation sociale du projet de consultations nationales de la Commission provisoire de réflexion sur la réconciliation nationale ?

Ce fut un  honneur pour moi de lire ce protocole d’entente devant le parterre de participants, d’officiels du gouvernement ivoirien et de médias, mais aussi une très grande responsabilité. C’était un moment déterminant pour les jeunes, car cette plateforme donne l’occasion aux jeunes de la sous-région d’interagir avec les autorités, institutions nationales, internationales et leurs pairs, pour mieux s’impliquer dans les politiques concernant l’implication des jeunes dans la prévention des conflits comme le recommandent différents instruments internationaux, régionaux et sous-régionaux notamment de la Résolution 2250 adoptée par le Conseil de sécurité des Nations Unies en décembre 2015, le Cadre de prévention des conflits (Cpcc) adopté par le Conseil de médiation et de sécurité de la Cedeao en janvier 2008 et la Charte africaine de la Jeunesse adoptée par la Conférence des chefs d’Etats et de gouvernements de l’Union africaine en juillet 2006.  C’était aussi une fierté car la Guinée vient de finaliser son processus de consultations nationales sur le processus de réconciliation par la remise du rapport à Son Excellence Monsieur le président de la République. Je sais que ce rapport prend en compte les avis des jeunes et des femmes, et que si les recommandations des coprésidents de la Cprn sont prises en compte, nous pourrons à l’avenir, prévenir les conflits et éviter que les répercussions impactent notre développement socio-économique. Pendant la formation, le thème : « Rôle de la jeunesse et de la Société civile dans les dynamiques nationales de réconciliation en Afrique de l’ouest » a été développé par les facilitateurs. Dans l’étude comparative des modèles de réconciliation en Afrique de l’ouest, le constat général des pays comme le Togo, le Burkina, le Mali, le Niger, la Côte d’Ivoire, a été l’absence et ou le manque d’implication des organisations de la Société civile dans le mécanisme. En Guinée, c’est d’ailleurs la Société civile et les organisations de jeunes qui ont conduit les consultations nationales pour recueillir l’avis des populations, pour également restituer les résultats aux mêmes populations. Ces deux franges étaient représentées au sein des structures d’appui de la Cprn comme le Comité consultatif, le Comité de coordination et de suivi, les équipes d’experts nationaux, les points focaux régionaux, communaux et préfectoraux.

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Vu la situation sécuritaire, quel est votre message aux jeunes ?

J’invite les jeunes à prendre leurs responsabilités pour être des acteurs n’ont pas de conflits, mais de lutte contre les violences qui touchent notre sous-région. Selon la Banque mondiale, 40 % de ceux qui rejoignent les mouvements rebelles et terroristes sont des jeunes en manque d’emploi. Pourtant notre continent qui regorge de ressources naturelles inestimables, a besoin de ressources humaines, et a plus que besoin de jeunes pour impulser son développement. C’est un réel choc de voir des jeunes mourir par milliers dans les eaux de la Méditerranée, tués dans des conflits armés, abusés et traumatisés, utilisés par les politiques politiciennes. Les pays d’Afrique sub-saharienne ont la plus grande proportion de moins de 30 ans dans la population au monde, avec 70 % de la population sous la barre des 30 ans. Notre sous-région peut donc tirer profit de sa jeunesse. C’est une opportunité à saisir.

Et votre mot de la fin ?

Il est temps pour nous de prendre notre destin en main, de nous impliquer dans la vie de nos nations et impulser le développement de notre sous-région qui traine encore le pas derrière les autres de l’Afrique de l’est, du nord et du sud.

Réalisée par Mady Bangoura in le Populaire

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