Quelqu’un a eu l’idée de lancer sur les réseaux sociaux un débat qui risque de faire du bruit dans les semaines à venir. Sans doute au-delà même de nos frontières ou de notre continent.

Le sujet est simple, court, précis et tranchant comme une lame de rasoir : Limitation de mandat pour tout le monde !

Pour être précis : pour tous les élus, quels qu’ils soient. On ne sait pas ce qui a motivé cette question soulevée par Ahmed Kourouma et quel est l’objectif visé mais tout intellectuel se trouve interpellé par le sujet.

En effet, pourquoi la limitation de mandat n’est-elle prévue que pour le Président de la République ? Pourquoi une mesure sensée empêcher la personnalisation du pouvoir, l’autocratie et la dictature ne serait-elle valable et utile qu’au dernier échelon de l’Etat ?

La démocratie est le régime politique le plus accepté dans le monde contemporain. Ce système a recours aux processus électoraux pour déterminer quels citoyens se verront confier la responsabilité fondamentale de les diriger.

En Afrique, les Etats ont décidé d’adopter ce système politique depuis leurs indépendances avec des fortunes diverses dans sa mise en application. Dans la plupart des pays, notamment en Afrique francophone, ces systèmes démocratiques ont été dévoyés pour se transformer en processus de légitimation de dictatures, parfois à vie. A partir des années 90, la société civile africaine, fortement appuyée par des ONG internationales, a commencé à contester (souvent violemment) ces dictatures et a exigé, à travers moult conférences et autres dialogues nationaux des garanties démocratiques pour leur pays.

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C’est à ce moment que sont apparues les constitutions de deuxième génération avec les fameuses dispositions intangibles sur la limitation des mandats.

La question que pose cette nouvelle et énième révolution démocratique africaine, c’est qu’à la pratique, elle ne va pas assez loin.

Les constitutionnalistes ont apparemment imaginé le maximum de ce qu’il est juridiquement possible de faire pour limiter les pouvoirs des Chefs d’Etat africains dans leur étendue et dans le temps. Mais qu’en est-il du reste de l’élite de nos Etats ?

La notion de démocratie, de bonne gouvernance, d’éthique, d’alternance ne doit pas se limiter à la seule fonction présidentielle. Les révolutionnaires africains ont commis une erreur stratégique en commençant leur révolution par le haut, par la fin, par l’aboutissement. Ils se sont limités à la représentation ultime des dérives dictatoriales à savoir la fonction suprême de Chef de l’Etat. Ils n’ont pas compris qu’il fallait descendre jusqu’à ses ramifications, ou plutôt ses racines profondes, là où l’esprit autocratique naît et grandit.

Toute œuvre solide et durable commence par la base, le sous-bassement ou les racines. Avant d’imposer des normes au sommet, il faut éduquer la base.

Nos présidents ne sont que les produits de notre société. Le combat politique, ils l’ont appris à l’école, à l’université, dans le monde associatif, dans le syndicat ou au sein de leur parti.

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Lorsqu’une organisation (comme l’OGDH) n’a connu qu’un seul président depuis sa création en 1990, jusqu’à la mort de ce dernier en 2015, quelle conception du pouvoir pensez-vous que ses membres vont retenir ?

Les chefs de partis, les députés, les sénateurs, les maires, les présidents de fédérations, de clubs, d’associations, bref, tous ceux investis, à quelque titre que ce soit, d’un mandat électif doivent être prêts eux-mêmes à céder la place au bout de leur deuxième mandat.

C’est à ce moment-là seulement que l’Afrique sera véritablement engagée vers la voie de la démocratie à la base et donc de la désacralisation du pouvoir, du renouvellement de sa classe politique, de la véritable confrontation des idées et des programmes. C’est en cela que nous aurons la légitimité de prétendre aussi à un développement inclusif et partagé.

Ce sera alors notre authentique révolution. Cela constituera la véritable honnêteté intellectuelle de nos élites et la leçon que la Guinée et l’Afrique pourront donner au monde. Enfin, ce sera l’occasion unique pour notre société civile de démontrer que ses actions et réactions ne sont pas l’expression non assumée de frustrations personnelles ou d’ambitions égoïstes maquillées en plaidoyers démagogiques.

Mais les élites africaines ont-elles seulement le courage d’aller jusque-là ?

Abou Maco

Journaliste

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