#IWMF-Madeleine Kolié, 24 ans, vit près de Gbouo, village situé à 15 km de N’Zérékoré. C’est là que cette rescapée d’Ebola nous reçoit un jour de novembre, entourée des siens. Celle qui a été contaminée par son beau-père et par la suite, perdu deux enfants, a affronté la maladie dans un contexte de rejet par les habitants de son village.  Mais  Madeleine s’est battue comme une belle lionne pour survivre à Ebola pendant que les quatre autres malades de son village en sont morts. Retrouver sa vie d’avant Ebola, est son nouveau challenge. Reportage.

Gbouo est situé à 15 Km du centre de N’zérékoré. Dans ce village de moins de cinq cent habitants, tout le monde se connait. Ici, Ebola ‘‘la maladie bizarre’’ entre par le beau-père de Madeleine Kolié. Et comme il est de coutume dans les familles africaines, la belle fille se charge des soins.  Le beau-père décède, la belle-sœur suit, et les gens se méfient de la famille dans le village.

Son histoire…

 « Personne n’a soupçonné que c’était Ebola. C’est après les deux premier décès qu’on nous a interpellés. Nous avons donc fait appel à la Croix rouge » déclare le chef de village Nema Loua.

Madeleine Kolié, contaminée, est d’abord transportée au « centre de tri » à N’zérékoré avec sa belle-mère, son mari David Haba et ses deux enfants avant de continuer : «Nous avons été transportés à Macenta avant d’aller à Gueckedou. Ma belle-mère et mon mari ont été déclarés négatifs à Ebola. Mon premier enfant est décédé quatre jours après notre arrivée sur place. Les médecins se sont bien occupés de moi pour que je retrouve ma santé. Je n’arrivais pas à manger. J’étais très malade. J’ai vu que les médecins se battaient contre la maladie pour me sauver. C’était vraiment dur », rappelle Madeleine qui témoigne aujourd’hui parce que la Croix rouge qui l’a aidée à surmonter le rejet le lui conseille.

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Le plus difficile pour elle a été l’annonce de sa propre guérison : « On m’a dit que j’étais guérie après une dizaine de jours. Mais j’avais perdu mon enfant. Et le deuxième, le plus petit qui n’avait pas encore un an était hospitalisé. J’étais heureuse mais inquiète pour mon fils. J’ai quitté le statut de patiente pour être garde malade. Quelle épreuve pour moi 

L’espoir d’avoir son fils guéri, fond. Il décède et les médecins demande à Madeleine de renter vu qu’elle n’a plus rien à faire sur place : « J’ai laissé une partie de moi là-bas… Mon fils » déplore-t-elle.

Face à la stigmatisation et la précarité

De retour dans son village après deux semaines d’absence, Madeleine Kolié est vue comme un paria dans le village. Une autre épreuve…

« Quand je suis revenue au village, j’ai tout perdu. Mes voisins, mes amis, mes associés en petites affaires. Personne ne voulait s’approcher de moi. Les gens qui venaient chercher l’argent de tontine chez moi me disait de l’emballer avant de les remettre. Je ne pouvais aller chez personne et vice versa », nous raconte-t-elle.

Cette brave femme a tout perdu. Lorsqu’elle est contaminée par Ebola, le café de Madeleine était déjà en maturité et elle venait de faire le semi de son riz. Elle a perdu toutes les cultures parce que sa famille était en quarantaine et personne d’autre n’a voulu s’occuper de son champ de riz et de la plantation de café.

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« Aujourd’hui nous essayons de joindre les deux bouts. On  faisait des tontines et nous étions engagés dans de petites entreprises en groupement. Mais vu que nous ne pouvions plus contribuer, nous avons tout perdu. Les gens ne tiennent pas comptent de ce que nous faisions avant la maladie. Je ne pouvais pas abandonner ma femme dans ces circonstances. Nous souffrons sur le plan moral et économique »  indique Cé David, époux de Madeleine Kolié.

Néanmoins, aujourd’hui, la situation est meilleure. Les gens sont moins agressifs avec Madeleine et sa famille. « Dans le village, il y a une petite amélioration.  La sensibilisation a permis de diminuer la stigmatisation. Mais vous savez au village, ce n’est pas facile. Les idées que les gens avaient d’Ebola ne partent pas facilement » dit Gbilié Antoine, adjoint du chef de village.

Hanny Haba, belle-mère de Madeleine qui ne pouvait pas abandonner sa belle-fille, selon ses dires, a maintenant l’opportunité de « remercier Dieu et les équipes de lutte contre Ebola ». Non sans oublier que par le passé : « personne n’osait s’approcher de nous sauf le chef de village. Dans le village, les gens ont abandonné notre puits. Nous étions seuls face à l’épreuve. »

#IWMF –Monique Curtis

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