Amnesty International a procédé au lancement simultané de son rapport 2017/2018 dans le monde ce jeudi 22 février 2018. En Guinée, la cérémonie s’est tenue au siège du Haut-Commissariat des Droits de l’Homme sise à Taouyah dans la commune de Ratoma.
Ce rapport fait globalement 486 pages et traite de la situation des droits de l’homme dans 159 pays du monde.
Le contexte général en Guinée, est le report des élections locales à février 2018 et les spéculations sur l’éventuelle candidature du président Alpha Condé à un troisième mandat.
Selon M. Aziz Diallo, membre d’Amnesty International section guinéenne, au moins 18 personnes ont été tuées et des dizaines de blessées pendant des manifestations.
« Au mois de février, 7 personnes ont été tuées à Conakry lors des manifestations liées à une grève contre la décision des autorités de revoir les conditions d’emplois des enseignants », indique le rapport.
Le même rapport indique que le 20 février, la police a interpellé sept défenseurs des droits humains membre du mouvement ‘’la voix du peuple’’ à l’origine d’un sit-in organisé à Conakry pour demander la réouverture des écoles.
Il est indiqué dans le même rapport, que durant les mois d’avril, mai et septembre, les forces de sécurité ont tirés à balles réelles lors des violentes manifestations pour dénoncer les conditions de vie difficiles dans la région de Boké. Quatre hommes au moins sont décédés des suites de blessure par balles.
Ainsi le 22 août, toujours selon le rapport, l’ancien militaire et syndicaliste Jean Dougou Guilavogui a été interpellé et amené à la maison centrale où il a été maintenu en détention sans jugement, jusqu’à sa libération sous caution le 21 décembre.
Liberté de la presse….
Pour ce qui est de la liberté d’expression, le rapport indique que des journalistes des défenseurs des droits humains qui s’étaient exprimés contre le gouvernement ont été roués de coup et détenus arbitrairement. 20 personnes arrêtées et 20 autres victimes de violences policières.
En Février, une journaliste de la radio Lynx Fm a été interpellée par des agents de sécurité alors qu’elle enquêtait sur les services de santé à Conakry. En Mai, un autre de Gangan TV a été frappé par des gendarmes alors qu’il filmait une altercation au sujet d’un conflit foncier. En juin, un autre de la radio Espace Fm s’est vu suspendu de ses fonctions par la Haute Autorité de la Communication (HAC), au motif qu’il s’était montré insultant lors d’un débat sur la polygamie. La même autorité a ordonné la station de Radio Espace Fm de cesser d’émettre durant une semaine au mois de novembre, parce qu’elle avait évoqué le manque de moyens des armées.
En juillet, la télévision nationale a suspendu un de ses journalistes parce qu’il avait dénoncé le faible taux de réussite au baccalauréat. Le 27 juin, un journaliste de guinéematin.com a été arrêté par des gendarmes à Lelouma, l’accusant de ‘’trouble à l’ordre public’’. Le 30 octobre, 4 journalistes de Gangan TV ont été arrêtés par des gendarmes à Matam et accusé d’avoir diffusé de fausses nouvelles et d’outrage au chef d’Etat. Au lendemain, 18 journalistes qui s’étaient rassemblés à la gendarmerie de Matam, ont été roués de coups par des membres des forces de sécurité.
Tradition d’impunité…
En matière d’impunité, le rapport rappelle le cas du capitaine de la brigade anti criminalité de Kipé en Février. Ce dernier a été arrêté et inculpé pour des actes de torture commis sur un homme en garde à vue. 10 autres gendarmes et policiers avaient été suspendus à la suite de ces faits, mais aucun n’a été déféré devant un juge.
Le rapport félicite les progrès qui ont été réalisés dans l’affaire du massacre du 28 septembre 2009, lors duquel plus de 150 manifestants non violents ont été tués et au moins 100 femmes violées.
En mars, le Sénégal a extradé Aboubacar Sidiki Diakité ‘’Alias Toumba’’ qui était en fuite depuis des années pour qu’il puisse répondre en Guinée d’accusations liées aux évènements survenus dans le stade. Plusieurs personnes inculpées de charges liées aux homicides et aux viols occupaient toujours des postes d’influence, y compris d’ancien haut responsable de la junte militaire. En novembre, les juges d’instruction ont annoncé que l’information judiciaire était terminée. Toutefois, aucun des auteurs présumés n’avait été traduit en justice à la fin de l’année.
Le rapport démontre qu’il n’y a eu aucun progrès sur les procédures engagées contre des membres des forces de sécurité pour des violations des droits humains commises lors des manifestations organisées à Conakry entre 2011 et 2017 et à Zogota en 2012 et lorsque les forces de sécurité occupaient le village de Womey en 2014.
Le droit au logement n’est pas mis à l’écart dans ce rapport. Car il démontre qu’en août, au moins 10 personnes dont au moins 2 enfants ont été tuées dans l’éboulement d’une décharge à Dar es Salam.
Nantènin Traoré